Talairan – Le Sentier du Facteur
Talairan – Le Sentier du Facteur
Jeudi soir, à la réunion préparatoire, Yvon, accompagnateur créateur de la randonnée, changea de destination. Initialement il était prévu de gravir le mont Fourcat en passant par le village de Croquié. Hélas, nous n’étions pas les seuls à avoir cette idée. Un trek passait par cet itinéraire et donc des centaines de participants en perspective empruntant les mêmes chemins que nous. Trop c’est trop !
Sans être foncièrement misanthrope, Yvon préféra choisir une autre destination. Il nous proposa le circuit dit du facteur c’est-à-dire une boucle de 17 km démarrant et arrivant à Talairan commune audoise de 370 âmes.
Seulement 5 hommes et 4 dames étaient intéressés, peut-être l’effet fête des Pères. Comment résister à un magnifique cadeau ? Départ à 7heures pétantes. Deux petites heures après nous foulions le gravier du parking de la cave coopérative de Talairan.
Village bien vide mais le sentier, un classique, était bien signalé et nous trouvâmes facilement le départ du circuit, pas besoin de se renseigner auprès des autochtones. De toute façon, le groupe comptait une moitié d’accompagnateurs dûment équipés et diplômés et en plus certains avaient déjà parcouru ces sentiers. Pas moyen de se perdre.
Dès le départ et tout au long du parcours, des panneaux nous renseignaient sur la vie du facteur parcourant ces chemins pour faire la tournée des bergeries trois fois par semaine. Certains détaillaient la flore, la faune endémiques à ce milieu, la rude vie locale et bien d’autres sujets. La garrigue n’a pas toujours été ce « désert » aride livré aux promeneurs que nous sommes. Beaucoup de petits métiers, aujourd’hui disparus, exploitaient les ressources qu’elle fournissait. Verriers, charbonniers, récolteurs d’écorces, éleveurs se suffisaient de ses prodigues. Mais la révolution industrielle a provoqué l’exode rural et façonné le paysage que nous découvrons maintenant.
Le groupe progressait allégrement tout en se régalant des délicates exhalaisons distillées par les nombreuses fleurs et plantes aromatiques envahissant de nouveau les prairies. Pas de difficultés majeures pour entraver notre progression. Il doit en être autrement par temps d’orage car les chemins nous semblaient bien ravinés par de furieux torrents. Par endroits, il n’y avait même plus de terre et c’est sur des dalles que se faisait la progression.
Si la flore, par sa beauté et son charme, constitue la richesse de la garrigue, elle abrite une variété de mammifères, chassés à l’automne par les tartarins locaux ainsi qu’une multitude d’oiseaux et une collection d’insectes qui occupent secrètement les lieux. Tout cela nous rassure un peu, l’extinction de ces petites bestioles serait moindre que celle observée dans nos villes.
La garrigue composée d’arbustes souvent armés d’épines est impénétrable hors chemins tracés, c’est un bien car ainsi nous épargnons la pédofaune (exemple : le ver de terre) qui entretient la fertilité des sols, en évitant de marcher n’importe où.
Les heures défilaient, les kilomètres aussi et vers midi ayant parcouru la moitié du trajet, nous atteignîmes un endroit frais au bord d’un petit ruisseau dénommé le Fourques.
Yvon décidât que ce havre de fraicheur ferait une magnifique salle à manger malgré les efforts à fournir après, l’estomac plein, car comme tout le monde le devine un cours d’eau coule au fond de quelque chose, ici le fourbe Fourques avait au fil des millénaires creusé un canyon qu’il faudrait bien remonter pour atteindre le plateau et suivre l’itinéraire prévu, ce qui inquiétait quelques-uns de nos amis sans toutefois leur couper l’appétit.
Allez savoir pourquoi mais la vue de l’eau claire fit régresser des marcheur(euse)s et c’est avec une âme d’enfant que certains (je tairais les noms) s’amusèrent à arroser la pauvre Pascale essayant de déjeuner à cheval sur les planches du pont. Et beaucoup de rire. Hélas, deux des 9 randonneurs se plaignirent de douleurs à bas bruits et décidèrent de shunter le parcours prévu en empruntant une variante réduisant le trajet de 4,5 km.
Vers 16 h, le groupe était reformé aux pieds des voitures. Le café, fréquenté lors de la dernière randonnée il y a 3 ans, était fermé. Nous décidâmes d’emprunter de magnifiques drèves pour rejoindre Lagrasse admis dans le club fermé des plus beaux villages de France grâce à son abbaye. Là, il n’y a que l’embarras du choix, tout un côté de la rue principale est bordé de cafés.
Partage de douceurs. Un grand merci à Yvon, au groupe qui permet de se surpasser. Tout le monde était ravi par les paysages, le bain de nature et d’air « pur » malgré que l’on sache pertinemment qu’il n’y a pas de frontières dans les masses d’air et que tout ce qui est produit dans les villes se diffuse. Il ne faut pas être naïf mais y-a-que la foi qui sauve ! A bientôt sur les chemins.