Boucle autour du Pic de la Quère
Boucle autour du Pic de la Quère
En lisant l’intitulé de ce compte-rendu, les cémécistes présents à la réunion du jeudi 18 novembre risquent de se méprendre et trouver que je suis hors sujet.
Oui et non. Oui, car lors de cette rencontre, nos animateurs Christine et Éric nous ont présenté une sortie de niveau 1 en vallée d’Estours, proche de Seix avec comme but l’admirable cascade d’Arcouzan qui chute de 80 m. Dix-sept marcheurs intéressés s’inscrivent malgré une météo plus qu’incertaine.
Il faut vous dire aussi, pour comprendre le changement d’itinéraire au dernier moment, que nos encadrants se réveillent en écoutant la radio pour appréhender le temps du jour souvent mêlé aux dernières informations. Quelle ne fut pas leur surprise, même mal ébroués à cette heure matutinale, d’entendre que précisément dans la vallée précitée, une ourse avait attaqué un chasseur.
Se doutant du remue-ménage que cet accident (aux conséquences graves pour ce giboyeur mais aussi pour l’ourse et ses deux oursons) allait occasionner, nos guides activèrent le plan B. D’où le nom et le titre donné à ces quelques lignes.
Le départ est fixé à 7 heures 30. Brève réunion préparatoire sur le parking que vous savez. En résumé : nous devrons parcourir une boucle d’environ 11,5 km, avaler un dénivelé de 550 m avec un point haut situé à 1129 m et un départ dans le petit village d’Alos niché à 658 m. Nous sommes bien en niveau 1. Secrètement, j’espère qu’il n’y aura pas de battue dans le secteur.
Avertissement au lecteur, ce compte-rendu sera aussi de niveau 1, il pourra y avoir quelques rudesses. Voici la première sous la forme d’une paronomase. Un exemple : la montagne ça vous gagne ou le CMC c’est le pied !
Pour ce compte-rendu j’utiliserai celle-ci : le cheminement me plaît moins, vous beaucoup. Dit autrement, l’itinéraire se retrouve amplement décrit dans maints opuscules ou sites spécialisés, mais ce groupe est unique et il est intéressant de le vivre.
À 9 heures et quart, nous nous équipons sur le parking aménagé du cimetière d’Alos. Les quatorze participants se sont entassés dans trois voitures. Bon co-voiturage, excellent point pour notre planète, nous n’aggravons pas le réchauffement climatique. Durant le trajet, pas besoin de radio pour rester vigilant. De nombreux sujets sont abordés, le flot continu de paroles est entretenu par les uns et les autres, mais aucun ultracrépidarianisme.
Cette deuxième difficulté linguistique n’aura d’égal que la sévérité de la pente juste à la sortie du village. Le rythme cardiaque s’élève rapidement, nous devons accorder respiration et progression sans tomber dans la zone rouge. Entre Christine qui dirige l’équipée et Éric qui joue le serre-file, chacun a trouvé sa place. Nous pouvons constater une parfaite corrélation entre place et âge.
Cahin-caha, nous avalons le dénivelé. Bien sûr, vêtus de multiples couches pour ne pas ressentir le froid au départ et ne se rappelant pas que notre corps obéit aux principes de la thermodynamique, en gros que le travail des muscles dégage de la chaleur, nous souffrons et transpirons abondamment. Mieux vaut faciliter l’évacuation excédentaire des calories, et donc premier arrêt pour se dévêtir et éviter la surchauffe. Nous avalons quelques graines, elles sont les bienvenues.
Le chemin tracé entre des hêtres centenaires grimpe sur environ un quart du parcours. Cueillis à froid, c’est une grosse difficulté pour certains, l’effet encourageant de ce groupe atténue l’effort soutenu. Merci à eux. Avec impatience nous attendons l’orée pour enfin découvrir le paysage que l’on espère resplendissant avec les premières neiges éclairées par un maigre soleil.
Peu après le col et fort discrètement, trop, une petite pancarte dans les noisetiers indique un mémorial. Un jeune résistant de 19 ans a été exécuté près de cet endroit. Son souvenir est matérialisé par un édicule fleuri. Des couronnes offertes par les forces britanniques complètent l’hommage à ce héros. Au retour en roulant vers Seix, nous apercevrons aussi un petit édifice en mémoire aux passeurs.
Au sommet du Tuc de la Perdrix, la table d’interprétation nous servira de salle à manger, il est 12h20. Nous aurions pu aussi choisir les équipements (tables et bancs) au col de Catchaudégué, légèrement en contrebas, la vue n’aurait pas été aussi dégagée. Ici beaux paysages, les sommets sont légèrement ennuagés, un petit soleil agrémente notre repas et ouvre l’appétit des convives. Attention, ce qui suit sera peut-être moins digeste à votre encontre. Vous pouvez sauter ce paragraphe.
Si nous sommes là, ici et maintenant après des millénaires, c’est que certaines structures de notre cerveau obéissent à des instincts qui nous poussent à survivre. Le premier était pour nos lointains ancêtres qui avaient tué une proie d’en ingurgiter le plus et le plus vite possible. On pouvait vous la voler et pas de frigo pour la conserver. Vous voyez où je veux en venir. Certains se jettent sur leur encas, le protègent, au cas où. La dopamine récompense ces agissements et l’on voit quelquefois les réserves accumulées. Maintenant, il y a plus de décès dus à la suralimentation dans le monde que ceux occasionnés par la famine ! Il faut leurrer le striatum*.
Pas de sieste, nous craignons la pluie, nous devons parcourir la partie la moins agréable de la boucle. Qu’il semble long ce chemin forestier montant. Enfin, grâce à l’excellent guidage de Christine puis d’Éric, nous obliquons et empruntons un agréable chemin en sous-bois, il fallait le trouver. Il n’y aura plus que de la descente. Valérie prend le temps de fureter de-ci, de-là dans les sous-bois alentour. Mais au grand dam de notre amie, pas la moindre trace de champignons comestibles, la saison est passée.
Cette boucle se parcourt presque que sur des chemins, ce n’est qu’à partir de maintenant qu’apparait le goudron. Cinq cents mètres plus loin, un large chemin en terre nous conduit jusqu’aux voitures.
Tout le monde est content d’avoir découvert cet endroit du parc régional pyrénéen. Nous remercions nos accompagnateurs pour leur plan B, en plus aucune erreur, aucun demi-tour. Bravo.
Reste à se mettre en quête d’un café, ce n’est pas le plus facile à dénicher. Premier échec à Seix, il est trop tôt. Sachez que si vous passez par ce village, le bistrot n’ouvre qu’à cinq heures. De mémoire, Éric se souvient qu’un salon de thé peut être ouvert à Saint-Lizier. Nous tentons, direction Saint-Lizier. Eurêka, il est ouvert, mais à quatorze nous restons dehors. Cela ne nous empêchera pas de déguster les excellents gâteaux de Claire, Cécile, Valérie et Nathalie. Merci à elles, avec politesse nous ne nous sommes pas jetés dessus ou alors le cortex cingulaire antérieur** s’est activé. Vous étiez prévenu, c’est le dernier gros mot, j’espère ne pas vous avoir rebuté.
* Striatum : Il est impliqué dans la motivation alimentaire (via le système dopaminergique)… Voir sur YouTube les films de Sébastien Bohler.
** Cortex cingulaire antérieur (CCA) : Le CCA est impliqué dans certains processus cognitifs comme la sélection de la réponse motrice et dans les comportements émotionnels.
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