La Cascade d’Arcouzan

La Cascade d'Arcouzan

Le printemps motivant les troupes du Club Montagne, c’est un groupe de 13 randonneurs qui s’étaient donné rendez-vous à 6h45 dimanche matin. Le lieu de randonnée n’était pas si loin (1h45 de route pour 130 km) mais un risque d’orage étant annoncé pour l’après-midi, il est préférable de partir le plus tôt possible pour essayer de passer entre les gouttes… avec des températures élevées et un fort vent du sud, le vent d’Espagne survolant les Pyrénées comme le chante Charles Trenet. Le but de cette randonnée R1 est de rejoindre la cascade d’Arcouzan au fond de la vallée d’Estours.

Nos véhicules prennent donc la direction de l’Ariège, Saint-Girons, Oust et Seix en suivant successivement les vallées de la Garonne, et du Salat pour s’enfoncer dans cette vallée perdue accessible par une route se transformant parfois en piste peu carrossable. Le hameau d’Estours apparait enfin, nous le dépassons encore par une piste forestière pour atteindre un parking de quelques places.

Le paysage est encaissé, la vallée entièrement boisée, et au milieu coule le torrent d’Estours dont le débit et la vitesse d’écoulement impressionnent les yeux et les oreilles, d’autant que la minicentrale électrique turbine à fond. Il est presque difficile de s’entendre dans ce brouhaha hydraulique.

Le décor étant planté, avant de poursuive ce compte-rendu, il est nécessaire de faire un petit retour en arrière. Il ne vous aura pas échappé que c’est la seconde fois que cette randonnée est programmée par le CMC. L’automne dernier, nous étions prêts à partir pour Estours quand, au dernier moment, nous avons annulé. En effet, un fait divers appris le matin même à la radio venait de se passer sur le territoire d’Estours au pied du Mont Valier : le samedi 20 novembre 2021 un chasseur attaqué par une ourse craignant par son ourson. Le chasseur gravement blessé avait dû abattre l’ourse pour survivre… autant vous dire que l’évènement de portée nationale avait obligé à boucler les secteurs. Nous avions donc pris la décision de remplacer cette randonnée par une autre située également dans le Haut-Salat : le tour du Pic de la Quère.

Revenons au 15 mai 2022 : 

Le chemin balisé en blanc et rouge (GR) s’élève doucement le long du torrent qui dévale de façon insensée au fond de la vallée, avec ses rapides, ses cascades, le lit du cours d’eau parfois large léchant les bords du sentier, ou bien très rétréci entre des roches ou des gorges étroites.

C’est un spectacle qui éveille tous les sens mais surtout les oreilles car le vacarme est intense. Et puis la fraîcheur de la masse d’eau à peine fondue des dernières neiges est saisissante sur la peau qui frissonne d’autant que des bouffées d’air chaud descendent par rafale des montagnes. Ces sensations de chaud-froid successives nous font ressentir les éléments et la force de la nature : l’eau glacée pourtant bouillonnante, le vent brûlant sur le visage, le bourdonnement de l’eau dans les oreilles. Quant aux yeux ils sont saturés du vert de la végétation en pleine bourre, mais aussi de la couleur argentée des eaux limpides du torrent.

Les fleurs printanières rajoutent des pointes de couleur à ce tableau impressionniste : jaune des pavots, pourpre des anémones, bleu profond des ancolies, violet ou blancheur de certaines orchidées, de l’ail d’ours…

L’ensemble du groupe est saisi par la beauté sauvage du lieu et nombreuses sont les pauses pour admirer et ressentir sa force. 

Le sentier s’écarte parfois des berges du torrent pour mieux le surélever ou pour franchir des éboulements, l’hiver est passé par là parfois violemment et nous devons parfois nous incliner ou passer par-dessous ou par-dessus des arbres écroulés.

Nous apercevons de vieilles cabanes rénovées ou totalement en ruine, quelques passerelles légères pour accéder à des prairies situées sur la rive opposée.

La végétation luxuriante, le torrent impétueux, les passerelles fragiles, les arbres couchés, les ruines mystérieuses, les sommets inaccessibles… il règne une ambiance Indiana Jones à la recherche du temple perdu… 

Paragraphe

Enfin, nous quittons le GR qui accède à la cabane d’Aula et nous franchissons une passerelle pour accéder à la cascade d’Arcouzan.

Il nous fait aussi traverser un drôle de névé boueux qui a tout emporté dans son avalanche de neige et de terre mélangées. Le volume des matériaux est gigantesque et creusé d’un tunnel de neige fondue.

Plus loin, le sentier non balisé est beaucoup moins facile, voire carrément difficile à trouver malgré les cairns disposés de façon aléatoire dans une pente raide et boisée, au sol très instable. Il s’agit de contourner une barre rocheuse. Merci à nos animatrices et notamment à notre nouvelle diplômée qui a su retrouver le bon itinéraire.

Nous accédons enfin à un surplomb enherbé qui domine le haut de la cascade dont, finalement, nous ne verrons pas l’intégralité de ses 80 m de chute… !

Mais cette légère déception est largement compensée par la vue imprenable sur le seigneur du Couserans, le Mont Valier et ses 2838 mètres ainsi que sur le fond de la vallée dominé par d’autres sommets formant un cirque imprenable. Le vertigineux sentier en lacets qui permet d’accéder au port d’Aula laisse rêveur… Nous sommes juste au-dessus de la cascade dont l’eau provient directement du dernier glacier d’Ariège situé sous le sommet du Mont Valier.

Il est 12h30, nous sommes à 1180 m d’altitude, rappelons que nous avons démarré la marche à 650 mètres à 9h15 et qu’il est grand temps de reprendre des forces.

C’est de ce nid d’aigle que nous déjeunons sans trop tarder car il fait chaud et le risque d’orage semble imminent.

Mais il n’en sera rien, hormis quelques gouttes à peine ressenties pendant la descente, le ciel se dégage presque complètement et nous profitons à plusieurs reprises de pauses rafraîchissantes près du torrent à l’ombre de ses berges boisées. Les plus courageux iront même visiter une curiosité géologique indiquée par des pêcheurs : un canyon où l’eau s’engouffre violemment formant des remous spectaculaires entre deux parois rocheuses resserrées.

Avant de regagner les voitures, nous croisons un groupe de randonneurs équipés de drôles de menhirs sur le dos… des kayaks ! Ils remontent le sentier avant de dévaler ce tempétueux torrent dans leur canot. Probablement des chevronnés !

Il fait très soif en fin de randonnée et nous nous retrouvons au bar de Seix où un marché aux fleurs anime la place du village. Nous y passons un bon moment, très agréable et désaltérant avant de regagner la métropole où l’orage nous attend peut-être…

♦ R1 ♦